Un salarié gréviste avait vu sa rémunération amputée de certaines primes, en déduction de son temps de grève.
L'employeur a été condamné pour discrimination.
La Cour de Cassation rappelle que l'employeur peut tenir compte des absences, même motivées par la grève, pour le paiement d'une prime, à la condition que toutes les absences, hormis celles qui sont légalement assimilées à un temps de travail effectif, entraînent les mêmes conséquences sur son attribution.
A défaut, déduire une prime pour fait de grève et ne pas la déduire pour un autre fait (en l'occurrence, une absence pour maladie) constitue une discrimination : l'employeur ne peut choisir les motifs de déduction. C'est tout ou rien.
Cass. Soc. 7 novembre 2018 n°17-15.833:
"Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la condamner à payer au salarié une somme au titre de la retenue pour fait de grève exercé en avril 2012 alors, selon le moyen :
1°/ que les juges du fond doivent se prononcer sur l'ensemble des pièces versées aux débats et ne peuvent accueillir ni rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que dans ses conclusions d'appel, elle faisait valoir que, pour toutes les absences non assimilées à du temps de travail effectif, les primes de quart et d'ancienneté étaient incluses dans l'assiette pour le calcul de la retenue opérée du fait de ladite absence, de sorte que pour ces primes, la retenue opérée sur la rémunération du salarié au titre de sa période de grève ne pouvait être considérée comme discriminatoire ; qu'à l'appui de ce moyen, la cour d'appel produisait différentes pièces dont il ressortait que les primes de quart et d'ancienneté étaient incluses dans l'assiette pour le calcul de la retenue opérée en cas de congés payés, d'absence pour maladie, pour congé pour événement familial, en cas d'autorisations d'absences payées ou non payées, et en cas de congé paternité ; que pour retenir l'existence d'une discrimination liée à l'exercice du droit de grève, la cour d'appel s'est uniquement fondée sur le règlement maladie Esso raffinage SAF et le guide administratif du personnel posté en 3x8 continu ; qu'en se déterminant ainsi, sans examiner ni même viser les pièces précédemment évoquées, produites par la société, la cour d'appel a méconnu les exigences s'induisant de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ subsidiairement, que la retenue de salaire en cas de grève doit correspondre au temps exact de la cessation de travail, ce qui suppose qu'elle soit calculée sur l'horaire mensuel des salariés ; que la société faisait valoir que la retenue sur salaire pour la participation du salarié au mouvement de grève devait être calculée en considération du nombre d'heures de référence du mois considéré, soit 138,64 heures ; que pour se prononcer comme elle l'a fait, la cour d'appel s'est fondée sur un temps de travail réel, effectif ou assimilé au cours du mois d'avril de 142 heures ; qu'en statuant de la sorte, sans s'expliquer sur les éléments l'ayant conduit à retenir cette référence de 142 heures, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 2511-1, L. 1134-2 et L. 1221-1 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, que si l'employeur peut tenir compte des absences, même motivées par la grève, pour le paiement d'une prime, c'est à la condition que toutes les absences, hormis celles qui sont légalement assimilées à un temps de travail effectif, entraînent les mêmes conséquences sur son attribution ;
Et attendu qu'ayant constaté que les salariés absents pour maladie non professionnelle ayant plus d'une année d'ancienneté bénéficiaient du maintien de leur plein salaire, y compris les primes, sans entraîner d'abattement de ces primes, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, en a exactement déduit, s'agissant de périodes d'absence qui ne sont pas légalement assimilées à un temps de travail effectif, que l'abattement des primes d'ancienneté, de quart et mensuelle, auquel l'employeur a procédé pour calculer la retenue relative aux jours d'absence du salarié pour fait de grève, présentait un caractère discriminatoire"
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